La maison Chanel crée la surprise en nommant Kendrick Lamar ambassadeur de sa collection de lunettes printemps-été 2025. Un geste symbolique qui en dit long sur le tournant stylistique de la griffe, en quête de modernité et d’ancrage dans la culture urbaine, loin des codes figés d’un luxe immuable.
Kendrick Lamar, figure majeure du hip-hop international, devient le nouvel ambassadeur de la ligne de lunettes Chanel. Dans la campagne fraîchement dévoilée par la maison, l’artiste californien apparaît sobrement vêtu, lunettes noires aux lignes épurées, ornées de perles de cristal. Le ton est posé, presque introspectif, à l’image du musicien. À travers ce choix, Chanel ne se contente pas de signer une campagne d’image : elle affiche une volonté claire de résonner avec une culture contemporaine, plus urbaine, plus transversale.
Modernité maîtrisée
La nouvelle collection de lunettes, disponible en boutique, ne trahit pas l’ADN de la maison : les cristaux sont là, les lignes sont nettes, le noir domine. Mais le regard porté change. En s’appuyant sur une figure comme Kendrick Lamar, Chanel assume une modernité plus ancrée dans le réel, moins distante, plus poreuse aux enjeux culturels contemporains.
Ce n’est pas une rupture, mais une évolution. Une maison comme Chanel ne renonce pas à ses codes si facilement. Mais elle sait les faire évoluer, subtilement. Et dans ce jeu d’équilibre entre tradition et innovation, Kendrick Lamar, avec sa rigueur artistique et son aura discrète, devient plus qu’un ambassadeur : il est le messager d’une époque que la maison commence, enfin, à écouter.

Les prémices d’une nouvelle ère
Pendant des décennies, Chanel s’est tenue à distance des influences urbaines. L’ère Lagerfeld, bien que visionnaire, avait dessiné les contours d’un luxe autoritaire. Après sa disparition en 2019, Virginie Viard avait pris soin de prolonger cette ligne, en y glissant quelques inflexions plus sensibles.
Mais depuis son départ, l’ambiance change. L’arrivée annoncée de Matthieu Blazy, passé par Bottega Veneta, ouvre de nouvelles perspectives. Le choix de Kendrick Lamar, à l’instar de la présence remarquée du rappeur français SCH lors de récents défilés, illustre également un tournant stratégique pour Chanel. Ces signes témoignent d’une volonté de la maison d’entrer en dialogue avec une génération pour qui le luxe se nourrit d’authenticité et de références issues de la rue. Dès lors, il ne serait pas surprenant de voir émerger, dans les prochaines collections, des silhouettes plus marquées par l’univers streetwear, à l’image des collaborations réussies de Balenciaga ou Louis Vuitton.
La collaboration de Chanel avec Pharrell Williams est un autre signe de cette évolution. L’artiste, qui entretient une relation étroite avec la maison depuis plusieurs années, a notamment travaillé avec Karl Lagerfeld sur des collections uniques, comme des sacs en édition limitée. Par son approche audacieuse, Pharrell a contribué à façonner l’image plus accessible et contemporaine que Chanel adopte aujourd’hui, fusionnant streetwear et haute couture.
Le choix de Chanel de s’adresser à une audience plus jeune et urbaine pourrait marquer le début d’un nouveau chapitre pour le luxe. À l’heure où les frontières entre haute couture et streetwear se floutent, la question se pose : le luxe traditionnel saura-t-il garder sa place dans un monde de plus en plus fluide et hybride ? – N.C.